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J.C.CABANEL

Venons-en à présent

Venons-en à présent, V\ M\ , au projet maçonnique, c'est-à-dire au but que les maçon(ne)s se donnent ou bien encore à l'"utopie" que la F\ M\ se propose de réaliser.

Dans le préambule de sa Constitution le G\ O\ D\ B\stipule que : "A l'extérieur du temple, dans la volonté d'assurer la libre expression de la pensée humaine, l'Assemblée du Grand Orient pose comme ultime devoir à l'Obédience l'honneur de sauvegarder toujours, en dépit de toutes les menaces ou contraintes, les aspirations des hommes à la liberté, à l'égalité et à la fraternité" (1)tandis que dans l'article 1er de sa Constitution le G\ O\ D\ F\ précise que : "La F M, institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, a pour objet la recherche de la vérité, l'étude de la morale et la pratique de la solidarité ; elle travaille à l'amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l'humanité" (2).

Se référant à la triptyque révolutionnaire de 1789, la F\ M\, que les Anglais "orthodoxes" et gardiens de l'ordre… établi – celui de la société bourgeoise, dont ils sont les enfants, autrement dit du… capitalisme - considèrent comme… irrégulières, la F\ M\ donc appelle ses "adeptes" à travailler, dans le temple et hors du temple, pour l'avènement d'une société de Liberté, d'Égalité et de Fraternité.

Il ne me semble pas que le caractère révolutionnaire d'un projet de changement ou d'un changement résulte du recours à la violence physique (insurrection, coup d'état, lutte armée…) mais, au contraire, de la… radicalité du changement. Ainsi, dans le domaine des connaissances et de la Science, Galilée, Copernic, Einstein, Freud… ont bien causé des révolutions sans pour autant recourir à la force (3). En politique, l'extension du suffrage universel aux femmes, l'abolition de la peine de mort pour ne prendre que ces exemples peuvent être considérés comme de véritables révolutions qui n'ont pas forcément été accouchées par la violence.

La radicalité d'un changement sociétal, comme, autre exemple, la reconnaissance des Droits de l'Enfant, peut donc résulter du seul fait du… progrès des mœurs, des pensées, des idées, des lois… Une telle voie de changement est usuellement qualifiée de réformisme pour l'opposer à une autre radicalité de changement qui, violente celle-ci, est qualifiée, du moins en politique, de… révolution.

Outre qu'elle ne repose que sur une différence de moyens, c'est-à-dire d'action ou, pour reprendre un terme maçonnique, de… travail et non de finalité, cette distinction occulte le fait qu'un changement radical, même s'il est recherché et obtenu pacifiquement, légalement, légitimement dans l'intérêt général tel qu'il peut s'incarner dans l'"écrasante majorité" d'une population donnée, est toujours… forcément imposé à des intérêts particuliers – individus, groupements, communautés, classe… - qui ne se retrouvent pas dans le changement radical en question. Pour ces intérêts particuliers, le changement radical n'est pas une réforme mais une révolution, une révolution illégitime, expropriatrice, usurpatrice…

Permettez-moi une citation V\ M\ : "Le constat face aux injustices sociales, celles que l’on subit personnellement ou celles faites à autrui, provoque notre révolte et l’on se dit qu’on ne peut pas rester sans rien faire devant une telle situation... Mais le seul sentiment de révolte ne veut pas dire grand chose: il est tout relatif. Ce qui vous semblera inacceptable ne le sera pas forcément aux yeux d’un autre. Par soumission, par inconscience ou par idéologie, certains ne voient hélas rien d’abject dans le racisme; ou estiment “normal” d’être soumis aux ordres d’un chef ! En fait, tout dépend de notre vécu, de notre réflexion, de notre éthique, de ce que nous considérons comme possible. Pour notre part, si nous contestons radicalement la société actuelle, c’est parce que nous sommes convaincus qu’une société de liberté, d’égalité et de fraternité est réalisable".

Cette citation pourrait être extraite du projet de création d'une L. ou d'une planche ou revue maçonnique. En fait, elle est tirée du programme de… l’Union Régionale Rhône-Alpes de la Fédération Anarchiste

D'aucuns, V\ M\, ne manqueront pas de dire que le propos de ce texte est trop… ouvert, marqué et pas assez mesuré pour que le-la maçon(ne) lambda puisse s'y retrouver et que, surtout, il fait implicitement appel à la violence comme facteur de changement radical.

Examinons donc un autre texte, celui de la page d'accueil de la F\ M\ belge, "œuvre" collective du Grand Orient de Belgique (G.O.B.), de la Grande Loge Féminine de Belgique G.L.F.B.), de la Grande Loge de Belgique (G.L.B.) et de la Fédération belge du Droit Humain (D.H.), portail, est-il nécessaire de le souligner, est ouvert au public profane :

"Ces quatre Obédiences,

  • fondamentalement respectueuses du principe de la liberté absolue de conscience,
  • persuadées que l’affranchissement (notamment social) de l’homme et de la femme passe par un combat sans concession à l’encontre des enfermements dogmatiques, des dérives sectaires et des idéologies contraires à la dignité humaine,
  • attachées indéfectiblement au principe d’Égalité,
  • conscientes que la démocratie et le principe de laïcité constituent les piliers nécessaires d’une organisation de la société,

ont décidé d’ouvrir ce site Web afin d’informer le monde profane que la Franc-Maçonnerie adogmatique belge s’inspire des principes suivants :

  • l’initiation et la pratique de la méthode symbolique;
  • le souci de travailler à l’amélioration de la condition humaine dans tous ses aspects;
  • la défense de la liberté de conscience, de pensée et d'expression;
  • la défense de l’harmonie entre tous les êtres humains par la conciliation des contraires;
  • le rejet de tout dogme".

Ce même texte précise que :

"La Franc-Maçonnerie est une alliance universelle ayant pour but la fraternité entre tous les hommes, le perfectionnement de l’être humain et le progrès de l’humanité. Elle se base sur le symbolisme de la construction, dont elle a adopté le langage, elle a un caractère essentiellement initiatique, c’est-à-dire une capacité à transformer et à améliorer l’être humain et elle permet discrètement, dans le respect du rythme de chacun, d’approcher de la connaissance, d’apprendre à apprendre, d’apprendre à ressentir, d’apprendre à partager, d’apprendre à écouter. N’étant ni église, ni école, la Franc-Maçonnerie ne souscrit à aucune doctrine, ni à aucun dogme. Elle prône la tolérance et contribue à la grandeur de l’homme, dont l’aventure la plus héroïque est de devenir un homme".

Propos… anodins. Aucunement révolutionnaires. Encore moins anarchistes. Et pourtant !

En effet, est-ce que le projet maçonnique de travailler à l'avènement d'une société de Liberté, d'Égalité et de Fraternité est… réformiste ? que nenni. Bien au contraire, ce projet est… révolutionnaire car n'est-ce pas vouloir faire la Révolution, au sens d'introduire un changement radical, que de vouloir instaurer la Liberté, l'Égalité et la Fraternité dans une société qui, en raison même de sa structuration économique et donc politique n'est ni libre, ni égale, ni fraternelle ? une société qui favorise l'accumulation des richesses de quelques un(e)s aux dépens de la misère d'une majorité sans cesse croissante ? le gain immédiat au prix de la (sur)vie de la planète et donc de l'humanité ? une société, disé-je, qui se construit sur et se nourrit de l'absence de Liberté, d'Égalité et de Fraternité.

En travaillant à l'évènement d'une société de Liberté, d'Égalité et de Fraternité les maçon(ne)s font œuvre d'… utopisme au sens où ils aspirent à la réalisation de leur idéal dans un contexte économique, politique, social, culturel, éthique… qui est l'antithèse de cet idéal.

Ce travail les maçon(ne)s le font dans le secret – que d'aucuns préfèrent qualifier de "simple discrétion" – de leurs loges (4). Au sens strict de "rassemblement de personnes ayant le projet, concerté et secret, de changer, transformer radicalement un ordre établi", c'est-à-dire une "société policée", les maçon(ne)s sont donc des… comploteurs-euses, terme qui, quelque peu désuet et désormais réservé aux seuls militaires, peut se traduire par… terroristes !

[Au passage, un bref rappel historique : Originellement (1794), le terme de terroriste a un sens particulier : celui d'une personne appliquant la politique de la Terreur pendant la Révolution française, ladite Terreur étant l'"ensemble des mesures d'exception prises par le gouvernement révolutionnaire depuis la chute des Girondins (juin 1793) jusqu'à celle de Robespierre (27 juillet 1794, 9 Thermidor de l'An II) ou, selon le mot de Robespierre "la justice prompte, sévère, inflexible" (5). A l'origine donc, le terrorisme, sous la forme précise de "Terreur" fut sinon légitime, du moins… légal, cela est souvent oublié pour cause, sans doute, d'Alzheimer historique !] (6).

Tout le monde s'accordera à dire que, de nos jours, peu de maçon(ne)s, à la différence de ceux qui, nombreux, au XIXème siècle firent le choix de la Charbonnerie en France, en Belgique, en Italie…, (7) fomentent un complot qualifiable de terroriste pour arriver à leur fin : le changement radical de la société et que la plupart travaillent à ce changement en planchant sur l'étude et la critique de la société mais également en exerçant  des… pressions (8), pas toujours amicales et fraternelles, sur et auprès des parlementaires, des gouvernants, des chefs d'entreprise…

Il existe un autre "art royal" de ce travail maçonnique : la… "propagande par l'exemple, la parole et les écrits" (9) qui, dans le vocabulaire anarchiste peut se traduire par… "l'action directe" (10) ou bien encore par… la propagande par le fait (11).

La société idéale dont "rêvent" les maçon(ne)s est une utopie comme l'est l'anarchie que les anarchistes attendent au lendemain du "Grand soir". Ce rêve partagé est souvent payé au prix fort, celui de la répression. Pourtant, il continue d'être fait. Par entêtement ? Non, je ne le pense pas. Ce rêve continue d'être fait, parce que, voyez-vous, V\ M\ , le choix d'être anarchiste et/ou maçon, n'est pas… anodin : il est celui que font des individus qui, ayant fait le choix de naître à leur humanité, tout simplement, dans leur action quotidienne – leur travail en somme -, leurs faits, leurs propos et leurs gestes s'efforcent de rester humains pour eux-elles mêmes et pour les autres. On ne naît pas maçon ou anarchiste. On le devient par choix. Dans l'un et l'autre cas, ce choix, pour la plupart du temps, est la conséquence d'une… révolte, celle du refus de l'injustice, c'est-à-dire de l'aliénation, l'inégalité, de la bestialité.

"Liberté – Égalité – Fraternité" ces trois mots ne sont pas seulement une… devise ornant… symboliquement le frontispice de bâtiments publics se dressant comme certaines rosettes qui, au regard des principes et, surtout, valeurs maçonniques sont plus des tâches de déshonneur que des emblèmes de "vertu" ou bien encore un "vestige du passé" que des maçon(ne)s, "traditionalistes" par ailleurs (12), vénèreraient comme d'autres vénèrent des… reliques, histoire de s'assurer qu'ils restent bien dans la châsse du passé et que, surtout, ils ne viennent pas perturber le sommeil pantouflant des vivants.

Non, "Liberté – Égalité – Fraternité" constituent bel et bien la quintessence d'un programme, celui du projet maçonnique d'une société (enfin) véritablement… humaine.

Ces trois mots peuvent être mis en musique sous un air de phrase et, ainsi, donner :

"La liberté comme base, l’égalité comme moyen, la fraternité comme but".

Dans ce libellé, quel(le) maçon(ne) ne se reconnaît(ra) pas ? Son auteur n'est portant pas maçon mais… anarchiste. Il s'agit de Ricardo Mella qui, dans "El idéal anarquista", résuma le projet de société de la C.N.T. pour lequel des dizaines de milliers d'anarchistes moururent et sous la bannière duquel se rangèrent de nombreux maçon(ne)s contre la machine de guerre autant franquiste que stalinienne.

Des FF\ ne manqueront pas de dire que les maçons, conformément au serment prononcé lors de leur initiation,  sont respectueux de la Loi quand les anarchistes ne le sont pas. Mais, V\ M\, à ces FF\, je pose la question suivante : de quelle Loi parlez-vous ? quelle Loi respectez-vous ? celle, par exemple, qui issue d'un suffrage démocratiquement majoritaire, instaure l'apartheid, l'état d'exception privatif de libertés individuelles et irrespectueux des droits fondamentaux, le délit de vagabondage pour un sans abri, un sans papier… ou bien celle de votre engagement maçonnique qui vous exhorte à lutter contre l'injustice, soutenir le faible, protéger la victime…, bref vous reconnaître en l'Autre, fût-il hors-la-loi de l'État, et le respecter autant que vous vous respectez ?

Face à un tel dilemme, de quel côté penche le cœur et l'action du maçon: celui, par exemple, de Thiers, boucher des Communard(e)s au nom du maintien de l'ordre et du respect de la Loi ou du F... communard et, peut-être anarchisant, même si cela importe peu de savoir qu'il le fût ou non, Félix Pyat (13) qui proclama :

"Frères, citoyens de la grande partie universelle, fidèles à nos principes communs : Liberté, Égalité, Fraternité, et plus logique que la Ligue des Droits de Paris, vous, Francs-Maçons, vous faites suivre vos paroles de vos actions. Aussi, après avoir affiché votre manifeste – le manifeste du cœur – sur les murailles de Paris, vous allez maintenant planter votre drapeau d'humanité sur les remparts de notre ville assiégée et bombardée. Vous allez protester ainsi contre les balles homicides et les boulets fratricides, au nom du droit et de la paix universelle".
Dans les différents forums, colloques, manifestations… organisés un peu partout, les anarchistes martèlent leur aspiration à une triple émancipation :

  • une émancipation politique pour instaurer la liberté
  • une émancipation économique pour instaurer l'égalité
  • et une émancipation intellectuelle pour instaurer la fraternité.

Ainsi, les anarchistes refusent le modèle sociétal, oppresseur et exploiteur, qui est la négation de l’individu et de ses aspirations. Ils cherchent par tous les moyens à montrer qu’il est possible et souhaitable de vivre dans une société libre, égalitaire (et donc égale) et fraternelle, gérée directement et librement par ses diverses composantes : individus, groupements sociaux, économiques, culturels, et ce dans le cadre due l'associationnisme et du fédéralisme libertaires.

Pour arriver à leurs fins, les anarchistes s'interdisent d'user de certains moyens car, comme le disait Errico Malatesta : " ces moyens ne sont pas arbitraires, ils dérivent nécessairement des fins que l’on se propose et des circonstances dans lesquelles on lutte. En se trompant sur le choix des moyens, on n’atteint pas le but envisagé, mais on s’en éloigne, vers des réalités souvent opposées et qui sont la conséquence naturelle et nécessaire des méthodes que l’on emploie".

Ne retrouve-t-on pas dans tout cela, même si dit autrement, le projet maçonnique ?

Les maçon(ne)s travaillent à l'avènement d'une société de Liberté, d'Égalité, de Fraternité qu'ils-elles ne… nomment point sauf à la qualifier de (véritablement) humaine et, parfois, d'…utopie, au sens d'idéal, de société idéale à bâtir. Pourtant, V\ M\ , une société de Liberté, d'Égalité et de Fraternité, si elle est bien (véritablement) humaine, a, d'un point de vue historique, politique, philosophique et éthique, un nom : l'Anarchie.

En effet, sans multiplier à l'infini les définitions de l'Anarchie, j'en prendrai trois tirées de la toile :

  • "L'anarchie (du grec an-, préfixe privatif : absence de, et archos, le commandement, ou "ce qui est premier") désigne la situation d'une société où il n'existe ni autorité, ni pouvoir, ni domination non plus qu'une quelconque hiérarchie entre les hommes. L’anarchie peut étymologiquement également être expliquée comme le refus de tout principe premier, de toute cause première, et comme revendication de la multiplicité face à l’unicité" (14).
  • "Du grec a, privatif, et arché, commandement, pouvoir, autorité. État d'un peuple, d'un milieu social, émancipé de toute tutelle gouvernementale. Système social fondé sur la libre entente de toutes les composantes de la société" (15) .
  • "Système politique selon lequel il n'y a pas d'ordre. Hélas, l'étymologie (et la mauvaise compréhension de ce mot par des anarchistes même) peut induire en erreur : archos signifie trois choses en grec (assez identifiées dans la société grecque) : les vieux, l'ordre, les commandements. Une mauvaise compréhension de l'anarchie serait de la qualifier de système politique sans ordre. Au contraire, l'anarchie nécessite des citoyens qu'ils gèrent eux-mêmes l'ordre de la cité..." (16).

Et une dernière de Pierre Kropotkine qui, lors de son procès à Lyon, le 1er janvier 1883, déclara :

"Ce qu'est l'anarchie, ce que sont les anarchistes, nous allons le dire :

Les anarchistes, messieurs, sont des citoyens qui, dans un siècle où l'on prêche partout la liberté des opinions, ont cru de leur devoir de se recommander de la liberté illimitée.(..) Nous voulons la liberté, c'est-à-dire que nous réclamons pour tout être humain le droit et le moyen de faire tout ce qui lui plaît, et de ne faire que ce qui lui plaît; de satisfaire intégralement tous ses besoins, sans autre limite que les impossibilités naturelles et les besoins de ses voisins également respectables.

Nous voulons la liberté et nous croyons son existence incompatible avec l'existence d'un pouvoir quelconque, quelles que soient son origine et sa forme, qu'il soit élu ou imposé, monarchiste ou républicain (...)

Le mal, en d'autres termes, aux yeux des anarchistes, ne réside pas dans telle forme de gouvernement plutôt que dans telle autre. Il est dans l'idée gouvernementale elle-même, il est dans le principe d'autorité.

La substitution, en un mot, dans les rapports humains, du libre contrat, perpétuellement révisable et résoluble, à la tutelle administrative et légale, à la discipline imposée, tel est notre idéal. Les anarchistes se proposent donc d'apprendre au peuple à se passer de gouvernement comme il commence à apprendre à se passer de Dieu.

Il apprendra également à se passer de propriétaires. Le pire des tyrans, en effet, n'est pas celui qui vous embastille, c'est celui qui vous affame. (..)

Pas de liberté sans égalité ! Pas de liberté dans une société où le capital est monopolisé par les mains d'une minorité qui va se réduisant tous les jours et où rien n'est également réparti, pas même l'éducation publique, payée par les deniers de tous.

Nous croyons, nous, que le capital, patrimoine commun de l'humanité puisqu'il est le fruit de la collaboration des générations passées (...) doit être à la disposition de tous (...)

Nous voulons. en un mot, l'égalité : l'égalité de fait, comme corollaire ou plutôt comme condition primordiale de la liberté de chacun selon ses facultés, à chacun selon ses besoins,- voilà ce que nous voulons sincèrement" (17).

Toutes ces définitions de l'anarchie, V\ M\ , ne sont-elles pas la traduction… politique du projet philosophique et éthique de la société idéale des maçon(ne)s ? Autrement dit, l'anarchie ne serait-elle pas le décryptage profane du symbolisme maçonnique de la triptyque, révolutionnaire en 1789, rappelons-le, de "Liberté – Égalité – Fraternité" ?

En somme, V\ M\, n'y a-t-il pas meilleure définition de l'anarchisme et de la F\ M\ que celle d'une utopie d'action et en action qui travaille à la construction d'un temple que d'aucuns se (com)plaisent à démolir sans cesse, le temple de l'humanité, parce que les anarchistes comme les maçon(ne)s ont pour précepte : "La liberté comme base, l'égalité comme moyen et la fraternité comme but" (18).

Ordo ab chao - transformer le chaos en ordre, extraire l'ordre du chaos-, est-ce que cette devise maçonnique n'est pas la réplique ("sismique" ?) de ce mot de notre F\ Élisée Reclus "l'anarchie est la plus haute idée de l'ordre", mot que je me plais, en souvenir de notre S\ Louise Michel, de compléter par "car elle est l'ordre sans le pouvoir" ?

 
(1) Souligné par moi, JC.

(2) Idem.

(3) Les opposant(e)s aux changements radicaux induits par les découvertes de ces savants, en revanche, n'ont pas hésité, parfois, à recourir à la force pour empêcher le changement.

(4) Les tenues des anarchistes sont moins discrètes, secrètes car quand elles sont autorisées, elles se font toujours sous la surveillance étroite de la Police, sachant que si de nombreux personnels de la Police sont maçon(e)s, en revanche, peu mais alors vraiment très peu sont… anarchistes !

(5) Autre rappel historique : à cette "terreur rouge" succédèrent deux périodes de "terreur blanche" que les royalistes firent régner en France, la première en 1795, la seconde en 1815, la "terreur versaillaise" de Thiers en 1871…

(6) "La propagande par le fait est un principe qui sera lancé comme association à la propagande verbale et écrite, exercice réalisé par la mouvance anarchiste, elle consistait à réaliser des expériences mettant en oeuvre les possibilités révolutionnaire qui mènerait à l'anarchie.
La répression que les communards durent subir suite à la commune de paris (1871), amena à un durcissement des positions des anarchistes. Bakounine, peu avant sa mort (1876), abandonna ses écrits, pensant qu'il était temps maintenant d'agir (ce sera une critique faite au mouvement anarchiste).

En 1876, dans le congrès international de Berne, Malatesta lança "la guerre continuelle aux institutions établies, voilà ce que nous appelons la révolution en permanence !" . Cela présageait la "propagande par le fait". Quatre ans plus tard, le 25 décembre 1880, Pierre Kropotkine clama dans son journal, "le Révolté" : "La révolte permanente par la parole, par l'écrit, par le poignard, le fusil, la dynamite (...), tout est bon pour nous qui n'est pas la légalité." C'est en 1881, au congrès international anarchiste à Londres (où étaient présents Louise Michel et Émile Pouget) que cette nouvelle stratégie sera proclamé et énoncé comme "propagande par le fait" (pour se joindre aux écrits et aux paroles). Elle devait se trouver sur le terrain de l'illégalité, avec des moyens en adéquation avec le but révolutionnaire qu'était le communisme libertaire.

Kropotkine (et entre temps beaucoup d'autres compagnons) changera de position en 1887 (quelques années avant la période "terroriste"), qu'il écrira également dans "le révolté", en rejetant l'illusion de conséquences positives d'un tel procédé".
Source : http://fra.anarchopedia.org/index.php/propagande_par_le_fait

"Aujourd'hui, et ce depuis longtemps et sauf en de très rares occasions, les anarchistes ne sont plus partisans de la terreur individuelle. Ils et elles croient toujours dans leur majorité, comme le dit Malatesta, que "la violence n'est justifiable que quand elle est nécessaire pour se défendre soi-même, ou défendre les autres contre la violence" et ajoutent souvent que "l'opprimé est toujours en état de légitime défense et il a toujours pleinement le droit de se révolter sans attendre qu'on lui tire effectivement dessus". Mais si les anarchistes défendent l'utilisation de la violence, il s'agit d'une violence de masse, populaire et révolutionnaire, et non plus de la violence individuelle, ou de petits groupes, toujours avant-gardiste dans le pire sens du mot, de la propagande par le fait".
Nicolas Phébus, Québec, mars 1998

(7) Et rappelons-le que ne firent pas les anarchistes maçons !

(8) En Anglais… lobbying.

(9) Cf; article 2 de la Constitution du G\ O\ D\ F\ "La Franc-Maçonnerie a pour devoir d'étendre à tous les membres de l'humanité les liens fraternels qui unissent les Francs-Maçons sur toute la surface du globe. Elle recommande à ses adeptes la propagande par l'exemple, la parole et les écrits, sous réserve de l'observation du secret maçonnique".

(10) Émile Pouget, Benoît Broutchoux, Fernand Pelloutier…
"Qu'est-ce donc que l'action directe? Une action individuelle ou collective exercée contre l'adversaire social par les seuls moyens de l'individu et du groupement. L'action directe est, en général, employée par les travailleurs organisés ou les individualités évoluées par opposition à l'action parlementaire aidée ou non par l'État. L'action parlementaire ou indirecte se déroule exclusivement sur le terrain légal par l'intermédiaire des groupes politiques et de leurs élus. L'action directe peut être légale ou illégale. Ceux qui l'emploient n'ont pas à s'en préoccuper. C'est avant tout et sur tous les terrains, le moyen d'opposer la force ouvrière à la force patronale. La légalité n'a rien a voir dans la solution des conflits sociaux. C'est la force seule qui les résout.

L'action directe n'est pas, cependant, nécessairement violente, mais elle n'exclut pas la violence. Elle n'est pas, non plus, forcément offensive. Elle peut parfaitement être défensive ou préventive d'une attaque patronale déclenchée ou sur le point de l'être, d'un lock-out partiel ou total, par exemple, déclaré ou susceptible de l'être à brève échéance."
CNT-AIT – Syndicat de l'Yonne.

(11) Bakounine, Kropotkine, Malatesta…

(12) Terme pris dans le "mauvais" sens de conservateur, conformiste, réactionnaire…

(13) Discours tenu le 29 avril 1871 devant 6 000 Francs-Maçons venus de 55 Loges parisiennes avant que ceux-ci n'aillent planter leurs bannières sur différentes barricades et, pour beaucoup, se fassent tuer par les versaillais. Quelques jours après, un ballon libre marqué des trois points symboliques s'éleva dans les airs et sema de nombreux exemplaires du "Manifeste maçonnique du 5 mai" appelant les Maçons de France et du monde entier à lutter en faveur des Communes de France fédérées avec celle de Paris. Le 18 avril 1871, au Palais de la Mutualité, eut lieu la commémoration du centenaire de la Commune de Paris. Sous la présidence de Léo Campion, cette manifestation regroupa toutes les obédiences maçonniques, tous les syndicats, la Ligue de l'Enseignement, la Ligue des Droits de l'Homme, la Ligue Internationale contre le Racisme et l'Antisémitisme, les partis de gauche et… la Fédération anarchiste. Le 24 avril 1971, plus de 3 000 maçon(ne)s, en tenue, bannières déployées, défilèrent devant le Mur des Fédérés du cimetière du Père Lachaise.

(17) Cité par Daniel Guérin dans "Ni Dieu, ni Maître, anthologie de l'Anarchisme", Maspero, édition 1978, page 65.

(18) Il existe toutefois une différence importante entre l'anarchisme et la Franc-Maçonnerie : un(e) anarchiste peut militer, être anarchiste de façon isolée, sans adhérer à quelque structure que ce soit. Il-elle sera reconnu(e) comme tel(el) dès lors qu'ils professent les valeurs anarchiques essentielles et que son comportement comme son action sont conformes à son engagement et à ses valeurs. En revanche, un(e) maçon(ne) ne peut être véritablement maçon(ne) que pour autant qu'il-elle est membre d'une L car c'est en ce lieu "sacré", plus que dans le monde profane, qu'il-elle est reconnu(e) comme tel(le) par ses pairs.

Poésie de J.C.Cabanel

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